Archives mensuelles : novembre 2022

Vous avez dit aphorisme ?

« L’aphorisme, lorsqu’il est bon, c’est un mot heureux, c’est une vérité ironique, c’est un concentré de philosophie, c’est une flèche qui frappe dans le mille, c’est l’intelligence qui cherche une issue et qui la trouve, c’est de l’humour raffiné, c’est un énorme détail, c’est la drôlerie du bref, c’est de l’éthique subtile, c’est la légèreté de la grammaire, c’est du cynisme surplombant, c’est un vers irréfutable, c’est un fragment lucide, c’est l’élégance de la syntaxe, c’est un tour archaïque et moderne à la fois, c’est tout le contraire d’un pavé, c’est une blague sublime, c’est un conte synthétique, c’est de l’esprit scientifique, c’est une pointe mémorable, c’est un jeu de mots révélateur, c’est un paradoxe inquiétant, c’est une autobiographie d’une ligne, c’est une définition inoubliable, c’est de la sagesse lapidaire, c’est de la joie instantanée, c’est un spectacle subversif, c’est la nostalgie du latin, l’aphorisme, lorsqu’il est bon, c’est l’érotisme de l’intelligence. » (Ramón Eder)

Source : Ce 33ème fragment provient « des quelques 60 fragments et aphorismes issus du recueil Ironías, publié en 2016 par Renacimiento, dans la collection « A la Mínima. Ramón Eder »; l’auteur est l’un des plus grands faiseurs d’aphorismes de notre époque. Méconnu en France, il propose un travail humble et ironique de fragmentation langagière du réel et de réflexion sur l’essence du bref contenue dans la formule aphoristique. » (Carole Fillière, Université Toulouse Jean Jaurès, Maîtresse de conférences : Aphorismes, Sélection et traduction de « métaphorismes » de Ramón Eder, in La main de Thôt – n° 06)

Les aphorismes de Bernard Barraud (dit Bernard B)

Un défroqué a toujours un peu mal au culte.

Aujourd’hui je décide que sont ouvertes la chasse aux idées et la pêche à la ligne : les mots n’ont qu’à se tenir à carreau !

Georges Perec aurait pu tirer la chasse d’O mais il a préféré casser des E.

Votre politique de la chaise vide, je m’assois dessus !

Nyctalope : insulte à la nuit.

Les bienheureux, les malheureux et entre les deux les à moitié heureux.

On ne dit pas indifférence mais une différence.

Ma ligne de vie : tantôt une ligne de l’être, tantôt une ligne de maux.

Plus il y a d’éléments de langage moins il y a de langage.

Il suffit d’entendre le mot f’âme pour se convaincre que l’âme y résonne (raisonne) pleinement, contrairement à ce que pourraient dire les z’ommes cons-plotistes.

Combattre le poison des incertitudes avec un antidoute.

Si vous pensez avoir été empoisonnés par un mariage d’argent alors prenez un anti-dot.

Le dérèglement climatique se règle toujours en espèces.

Chaque matin devant mon miroir je me demande combien d’humains vivent sous le seuil de beauté.

La raison a ses failles que Pascal Lafaille ignore.

Dans le train-train de la vie quotidienne on n’a qu’un billet aller-aller.

Je me demande comment l’argent sale peut ne pas avoir d’odeur.

Supprimer l’impôt sur la fortune est une faute de coût.

J’ai enfin trouvé la clef de l’énigme mais ça fait un moment qu’on est passé au digicode.

La clef de l’énigme, oui mais pour quelle porte ?

Les illuminations divines seront chassées par le dieu de la sobriété énergétique.

Bernard Barraud (dit Bernard B)